• Commençons par le plus simple, qui est aussi le plus difficile : la première chose qui vient à l'esprit, pour un lecteur attentif et "réflexif" de Zauberberg, c'est la polarité qui agit sur l'âme du héros, de Hans Castorp : polarité entre le haut et le bas, entre la "vie dans la plaine" (qui était son destin prévisible d'ingénieur naval, avant qu'il ne découvre son "talent pour la maladie" à Davos) et la vie chez ceux d'en haut.

    Une polarité qui est aussi symbolisée par les deux "forces" qui s'exercent sur Hans Castorp à travers les deux personnages principaux que sont Settembrini et Naphta.

    Settembrini est évidemment le représentant de l'esprit des Lumières, privilégiant la raison, les sciences modernes, l'action dans le monde, la liberté de conscience individuelle, toutes choses d'ailleurs très sympathique.

    Naphta, le jésuite, le "né juif" converti au catholicisme, représente le pôle inverse : dogmatisme, mysticisme, irrationalisme, ou plutôt peut être limitation de la raison à des tâches pratiques et serviles, supériorité de la foi et de la théologie sur la philosophie rationnelle, obéissance à ce qui est imposé d'en haut par une hiérarchie spirituelle (c'est ce qui distingue le catholicisme du protestantisme).

    Quant à Castorp, il est le représentant de l'humanité moderne, semblable à cela au Faust de Goethe (on ne comprend d'ailleurs pas grand chose à l'ouvrage de Thomas Mann si l'on ignore Goethe)

    Si l'on a lu quelques ouvrages anthroposophiques, on ne peut pas ne pas penser au couple des puissances adverses de l'humanité que sont Lucifer et Ahriman.

    Ahriman, la puissance qui pousse à l'incarnation terrestre et à ses limitations, est évidemment le côté où penche Settembrini; et Lucifer est le côté où penche Naphta.

    Mais peut on pour autant dire que Settembrini est le représentant d'Ahriman et Naphta celui de Lucifer ? non, car ce serait trop simple, voire simpliste...

    nous devons ici tenir compte du côté dialectique des "choses spirituelles".

    Commençons par Settembrini, puisqu' il est celui qui est introduit le premier dans le roman, bien avant Naphta.

    Pour comprendre ce qu'est Ahriman, et étudier en relation avec ce savoir les faits et gestes de Settembrini, le mieux est évidemment de se reporter aux écrits de Rudolf Steiner. Mais il existe sur Internet un texte en anglais, écrit par Robert Mason, qui semble utile pour notre propos : "The advent of Ahriman: an essay on the deep forces behind the world-crisis"":

    http://www.altanthroinfo.9f.com/ahriman.htm

    Mais bien sûr le livre crucial de Rudolf Steiner pour comprendre ces choses est : "Lucifer et Ahriman, leur influence dans l'âme et dans la vie"; or il en existe une version anglaise accessible à l'adresse suivante :

    http://www.hermetics.org/pdf/steiner/Rudolf_Steiner_-_Lucifer_Ahriman_Asuras.pdf

    voir aussi :

    http://www.doyletics.com/arj/landarvw.htm

    http://www.bibleandanthroposophy.com/Smith/main/burning_bush/charts_tabs/i32.html

    http://wn.rsarchive.org/Lectures/Places/Dornach/19141120p01.html (cours de Steiner)

    http://books.google.fr/books?id=RWnnfwRivb8C&dq=steiner+lucifer+ahriman&printsec=frontcover&source=bl&ots=Gc0hKnMOc7&sig=-eQy8s8tZzs02kw_dp08zlGm7W4&hl=fr&ei=kU95SuqMC5bLjAeS4qW9Bw&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=5#v=onepage&q=&f=false

    http://8esphere.blogspot.com/2007/09/machine-planet-our-future.html

     

     


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  • Les livres sont ce qui a le plus compté dans ma vie (cette formulation est d'ailleurs idiote en ce qu'elle ne rend pas "justice" au rôle qu'ils ont joué, mais peu importe).

    Mais je me rends compte maintenant, avec le recul suffisant, que c'est "La montagne magique" qui a été pour moi, pour l'individu que je suis, LE LIVRE. Un peu comme la Torah pour les juifs, le Coran pour les musulmans, l'Evangile pour les chrétiens.... encore que cela ne soit peut être pas tout à fait exact : il ne s'agit pas de religion, de sacré, de traditions familiales...

    m'en suis je aperçu au moment où je l'ai lu pour la première fois, c'est à dire en 1974, au cours de l'automne et de l'hiver de 1974, en cette période où je terminais mes études "générales", et où je me préparais à entamer mes études "professionnelles", à partir de l'automne 1975, après la deuxième période de mon service militaire ?

    Oui et non, dirais je...

    J'ai tout de suite vu que ce livre produisais sur moi un effet tout "spécial", que je ne pouvais pas m'arrêter d'y penser, que les correspondances, les analogies entre le destin de Hans Castorp et le mien (qui n'était pas encore joué, mais je sentais bien où je serais entraîné), tout différents qu'ils fussent, m'intriguaient.

    Mais il est vrai que d'autres "grands livres", avant ou après, ont pu avoir sur moi une telle influence , je cite pêle mêle les premiers qui me viennent à l'esprit : "La recherche du temps perdu", les romans de Balzac, la Divine Comédie, Bartleby ou Moby Dick de Melville, certains romans ou nouvelles de Faulkner ou de Joseph Conrad, les grands poèmes de Coleridge, les deux Faust de Goethe...

    Mais je comprends maintenant la spécificité de l'influence qu'a eue la Montagne magique, je la comprends depuis peu en fait , et pourtant les choses sont si simples : moi aussi, comme Castorp, j'ai subi la "séduction de la mort et de la maladie", moi aussi j'ai vécu chez ceux d'en haut, en me "retranchant" de la vie dans la plaine, mais évidemment de manière toute différente extérieurement... la montagne magique, pour moi, ce furent les livres !

    et tous les livres se récapitulent en celui là.

    C'est pourquoi la nature et l'élaboration de ce blog "coulent  de source" en quelque sorte, et ce tout naturellement : par le biais d' un "voyage" à travers le texte du livre de Thomas Mann, je parlerai de tout ce que je lis par ailleurs , sur tous les thèmes : philosophie, sciences, poésie, art, politique, etc...

     


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